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leurs revenus. Cet état de souffrance prolongé doit nécessairement amener des changements dans les expéditions des ports de la mer Noire. Il est à présumer que les négociants d'Odessa porteront leurs vues sur la fabrication des farines (1), plus faciles à transporter dans les contrées éloignées, et qui exigent moins d'emplacement dans les bâtiments: ils chercheront de nouveaux débouchés dans des pays avec lesquels, sans les circonstances actuelles, ils n'auroient peut-être jamais eu de rapports. Ils s'accoutumeront à former eux-mêmes, sur divers points de la Méditerranée, des entrepôts de grains pour les années de disette, et profiteront ainsi des augmentations qu'éprouveroit cette marchandise. Leur commerce sera moins facile que lorsqu'il ne se faisoit que par commission; il deviendra plus compliqué, exigera plus de capitaux; mais il sera plus lucratif, il aura un plus grand développement. D'une autre part, l'agriculteur, effrayé de la baisse des grains, sentira la nécessité de varier sa culture. Le revenu de ses terres ne reposera plus sur les seules cé

(1) Une association vient, dit-on, de se former pour la fabrication des farines. J'avoue qu'il m'eût paru plus sage d'établir les moulins en Pologne même qu'à Odessa, où il n'existe point de chutes d'eau, et où on manque de bois.

réales: il s'occupera de plantations; il multipliera ses bestiaux; ses haras seront plus nombreux; la race de ses moutons s'améliorera; les cuirs, les suifs, les bœufs salés, les laines, les chanvres, la cire, le tabac, deviendront alors des articles importants d'exportation. Les produits variés des terres de la Russie méridionale viendront, sur tous les marchés, en concurrence avec ceux qui sont fournis par les États-Unis; et ainsi, les mesures prohibitives adoptées par tous les états de la Méditerranée, en occasionnant aux propriétaires de la Russie une perte momentanée, auront déterminé une grande amélioration dans l'agriculture et des innovations heureuses pour le commerce. L'essai de M. Anthoine sur le commerce de la mer Noire, et celui de M. Siccard sur Odessa, donnent des renseignements précieux sur les divers produits de la Russie qu'on pourroit exporter de ce port. Il est d'autres branches de commerce dont ils ne pouvoient parler à l'époque où leurs je supplée à leur silence.

ouvrages

ont paru, et

En 1811, la Russie a réuni à ses états la Bessarabie et la partie de la Moldavie en-deçà du Pruth; mais tant que la quarantaine restera placée sur la rive gauche du Dniester, et qu'on ne pourra traverser ce fleuve sans être assujéti à

la rigueur des mesures sanitaires, cette contrée sera nulle pour Odessa. On ne peut se dissimuler toutefois que la possession de ce pays met le commerce de la Moldavie, et même celui de la Valachie, entre les mains des Russes. Autrefois ces provinces consommoient une immense quantité de draps, de soieries de Lyon, de dorures, de quincailleries, d'épiceries, tous articles que leur envoie encore Constantinople, et qu'Odessa pourroit leur procurer avec plus de facilité et à plus bas prix.

La Moldavie et la Valachie fournissent beau

coup de cire, de cuirs de bœufs et de buffles, des laines, des suifs, des lins, des chanvres, des grains, des viandes salées et fumées, enfin des bois de construction et des mâtures. L'espèce de brebis qui domine dans les troupeaux est la brebis cigaye, à laine longue et fine, qui provient encore, dit-on, d'une race améliorée au temps de Trajan, lorsque cet empereur s'empara de cette contrée connue alors sous le nom de Dacie. C'est de cette espèce qu'étoit composé le troupeau de quinze cents bêtes que le comte de Langeron a fait acheter, en 1817, dans la Bessarabie, et qui a été envoyé aux cosaques de la mer Noire, sur les bords du Kouban.

Il y a dans la Moldavie deux races remar

quables de chevaux. Celle des montagnes est petite, mais infatigable, et parfaite pour la cavalerie légère. Celle des plaines est de haute taille, et a les formes si belles, que les Turcs disent proverbialement qu'un cheval moldave et un jeune garçon persan sont les deux êtres les plus parfaits qu'ait produits la nature.

Lorsque le Dniester sera débarrassé des bureaux de la quarantaine, et rendu à la navigation, les produits que fournissent les contrées placées sur ses deux rives pourront descendre jusque près d'Odessa (1).

(1) L'importance de cette communication me détermine à entrer à ce sujet dans quelques détails.

C'est à un des hommes les plus courageux, les plus actifs, les plus aventureux de ce siècle, à un homme qui sembloit avoir pris Charles XII pour modèle, au prince de Nassau-Siegen, que l'on doit les premières recherches sur la possibilité de tirer parti de la navigation du Dniester.

En 1789, il descendit ce fleuve, le visita, et le fit sonder dans toute sa longueur, accompagné dans ce voyage par l'abbé Gaspari. En 1803 et 1804, il en fit une nouvelle inspection, et en fit dresser avec beaucoup de soin la carte, qu'on trouve au dépôt de la guerre à Pétersbourg.

Lorsque M. le duc de Richelieu fut nommé gouverneur de la Nouvelle-Russie, son premier soin fut d'encourager un particulier à faire un essai qui pût ajouter le sceau de l'expérience aux observations faites par le prince de Nassau, et ce voyage fut couronné d'un entier succès.

Le bâtiment qui servit à cette expédition avoit cent

Au-delà du Dniester, et sur une ligne parallèle, on trouve le Pruth, frontière actuelle de la Russie et de la Moldavie. Sur les bords de ce

vingt pieds de longueur, sur quarante de largeur, avec mâts et voiles, comme ceux dont on fait usage sur l'Elbe. Parti le 25 avril 1804 du village de Rosovodock à cinq milles ou dix lieues de Lemberg, point où le Dniester commence à être navigable, il arriva le 29 du même mois à Zalestchik, ville du cercle, où il séjourna jusqu'au 10 mai, pour y prendre un chargement en bois de construction et autres marchandises. Il mit deux jours pour arriver à Iwanetz, vis-à-vis la forteresse de Khotin (appartenant alors aux Turcs). Il y prit des passeports, et y compléta sa cargaison. Passant ensuite à Mohilew, ville considérable, propriété du comte Potoski, où il se fait un assez grand commerce avec la Moldavie, il arriva sans accident à Yampol. On y prend des pilotes à cause des rochers de granit qui se trouvent au-dessous de la ville, et au milieu desquels il n'existe, pour le passage des bateaux, que deux ouvertures étroites. Ici, le courant est très-rapide; il conviendroit d'en élargir les passages, en faisant sauter une partie des rochers. On touche ensuite à Tzekinowka et à Doubosar. Aux environs de ces villes, on trouve des vignes qui passent pour avoir été plantées par les Romains. Sur une longueur de sept à huit lieues, les terres sont tantôt sablonneuses, tantôt pierreuses, et en général d'un foible produit.

Le 31 mai, le bâtiment s'arrêta à Bender, et de là il passa à Slobodzée, d'où le Dniester fait d'immenses détours avant d'arriver à la mer Noire, traversant un pays couvert d'arbres et de broussailles. Sur ce point il s'est formé en ligne droite un canal naturel : déjà il peut servir au flottage. Avec une foible dépense, on le rendroit navi

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