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suivies de trente à quarante princes ou nobles, également à cheval. Enfin, elle étoit accompagnée d'un pareil nombre de Mingreliens, hommes de service, et qui ont l'habitude de suivre à pied leurs seigneurs dans leurs voyages, quelle que soit l'allure de leurs chevaux, et même de traverser les rivières à gué, ayant souvent de l'eau jusqu'à la ceinture.

Les femmes portoient presque toutes un manteau de drap écarlate, et, sur la tête, un chapeau rond en feutre de même couleur, relevé des deux côtés par des ganses, bordé de galons et garni d'ornements et de monnoies d'or ou d'argent. Ces manteaux et ces chapeaux ne servent qu'en voyage, et passent d'une génération à l'autre. La housse qui servoit à couvrir le cheval de la princesse Dadian étoit de brocard d'or et pendoit jusqu'à terre. Dans sa marche, un seigneur Mingrelien, à pied, tenoit son cheval par la bride.

En contraste de ce luxe 'oriental, les nobles qui précédoient la princesse ayant acheté à Kotaïs de l'esturgeon salé pour leur approvisionnement, en portoient un faisceau suspendu à chaque côté de leur cheval, et les esclaves, tout déguenillés, marchoient pieds-nus. Un pope ou prêtre, à cheval, faisoit partie de la suite de la

princesse; elle avoit aussi avec elle ses deux fils et leur gouverneur.

Parmi les piétons, on remarquoit deux secrétaires portant, comme les Grecs à l'époque de la prise de Constantinople par les Latins, un long encrier de cuivre à la ceinture. Ils le nomment calamara.

Le prince Dadian habite encore le château de Zougdidi, visité par Chardin; il y tient une cour très-nombreuse. Il change fréquemment d'habitation pendant l'été, tantôt pour se livrer aux plaisirs de la chasse, tantôt pour éviter les grandes chaleurs.

Je ne pense pas que le revenu de Dadian s'élève à plus de 12,500 roubles d'argent (environ 50,000 fr.), indépendamment des produits en nature qui servent à la consommation de sa maison; et cependant de quels immenses revenus ses seuls domaines ne seroient-ils pas susceptibles?

CHAPITRE V.

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Départ de Redoute-Kalé.-Terres de Dadian et du prince Djayan. Khorga.-Rencontre d'un jeune Mingrelien. -Monastère de Khopi. — Mauvais chemins.—Maire du village de Khopi.-Son hospitalité.-Sakharbet.—-Siva. -Difficulté de son passage.-Techaour.-Ancien château.-Abacha.

APRÈS avoir passé un mois à Redoute-Kalé nous en partîmes le dimanche 7-19 juin.

En sortant de la forteresse pour se rendre à la poste de Khorga, on traverse la Syba, et on cotoie la Khopi, laissant sur sa gauche l'hôpital et les autres bâtiments de la couronne. On parcourt ensuite le bazar dans toute sa longueur, et on entre dans des forêts, dont on recule successivement les bornes par des défrichements qu'exige l'agrandissement de Redoute-Kalé, et qui contribuent en même temps à rendre l'air beaucoup plus salubre.

Toutes les forêts qui environnent Redoute

Kalé, et qui bordent la gauche de la Khopi, appartiennent à Dadian, prince souverain de la Mingrelie; celles de la droite, au prince Djayan, parent de Dadian, qui, lui ayant fait des avances en argent, a conservé sur ces biens une sorte d'hypothèque. Au surplus, ces forêts sont si nombreuses, et ont encore si peu de valeur à leurs yeux, que jamais ces deux princes n'ont songé à tracer les limites de leurs propriétés respectives.

Elles se prolongent depuis Redoute-Kalé jusqu'à la poste d'Abacha, qui en est éloignée de quatre-vingts werstes; elles sont interrompues, de distance en distance, par des pâturages et par quelques parties de terres consacrées à la culture du millet, du maïs et du tabac.

On compte seulement vingt-trois werstes de Redoute-Kalé à Khorga; mais la distance est au moins de vingt-huit werstes. Le chemin cotoie presque toujours la Khopi, ou s'en éloigne peu. A environ quinze werstes de Redoute-Kalé, nous trouvâmes déjà les premières maisons du village de Khorga, qui, séparées les unes des autres par des portions de bois et des terres cultivées, se prolongent jusqu'à la poste, sur une longueur de près de sept werstes.

Toutes les maisons sont bâties en bois et cou

vertes de paille de maïs ou de roseaux : elles ont deux portes, l'une vis-à-vis de l'autre. Elles n'ont ni fenêtres ni cheminées; le foyer est placé au milieu de la chambre : la fumée sort par le toit toujours mal lié, ou par les portes.

Au milieu de ces demeures enfumées, les tapis Tartares et Persans étoient assez communs; et cet objet de luxe contrastoit avec l'absence de tout autre meuble, si on en excepte des bancs étroits qui tiennent lieu de table à manger.

Un grand nombre de ces maisons étoient placées sur des plateaux élevés, où l'air est meilleur que dans les terres basses; quelques-unes étoient cachées dans le plus épais des bois.

L'aune est l'espèce dominante dans les forêts de cette partie de la Mingrelie, et sa végétation

y

est très-remarquable, comme celle de tous les arbres qui croissent dans cette terre grasse, humide et fertile. Nous y avons observé quelques mûriers, des châtaigniers, un petit nombre de hêtres, de charmes et de chênes; quelques figuiers avoient plus de quatre pieds de tour. On y trouve aussi des pruniers, des poiriers de plusieurs espèces, des abricotiers, des pêchers, des cognassiers, des néfliers, des noyers et des frênes très-gros. Mais notre attention se fixa

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