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Les marchandises sont déposées à Trébizonde dans des caravanserails en pierre. On en compte onze: tous ont des chambres où logent les négociants étrangers. Le besestein est placé au milieu de la ville il est vaste et carré, avec deux fenêtres de chaque côté. Cet édifice a vraisemblablement été construit par les Génois, et leur servoit peut-être de magasin à poudre.

Les négociants de Trébizonde ont presque tous des associés à Arzroum et à Constantinople qui servent d'intermédiaires, en expédiant les marchanchandises qu'ils reçoivent, au commerce réciproque de ces deux dernières villes. Quoique Arzroum soit le principal lieu des échanges, il se fait aussi à Trébizonde beaucoup de ventes et d'achats. On évite ainsi les frais de transport à Arzroum, qui sont de 40 à 45 piastres les trente batmans (1). Les négociants turcs se contentent en général d'un léger bénéfice, et s'ils achètent à terme pour trois ou quatre mois, ils sont exacts à remplir leurs engagements. La principale branche du commerce de Trébizonde et la plus lucrative seroit, sans contredit, le cuivre d'Argana-Maden (2). On le porte à Trébizonde non purifié. Sept fours sont destinés à cette opération.

(1) J'ai déjà dit ailleurs que le batman est composé de six ocques, l'ocque de quatre cents dragmes; cent cinquantetrois dragmes font une livre, poids de marc.

(2) Je suis entré dans de grands détails sur cette mine dans mon Voyage en Perse, tome 1er, page 60.

Le négociant qui en a le porte à un de ces fours, et s'il surveille lui-même l'opération, il n'aura qu'un déchet de quinze pour cent. D'après un compte exact que j'ai dressé (1), six mille batmans de ce métal, déduction faite du prix d'achat, des frais de transport à Trébizonde et de cuisson, laisseroient, vendus sur les lieux mêmes, un bénéfice d'environ vingt pour cent. Ce bénéfice seroit bien plus considérable, si l'on avoit un four à soi, parce qu'alors la

(1) Voici le compte simulé:

Six mille batmans, cuivre d'Argana, à piastres 7 et demie le batman...

Voiture à 47 piastres le batman jusqu'à Trébizonde..

45,000 piastres.

7,050

Frais de cuisson à 10 piastres les vingt

batmans..

3,000

55,050

Les six mille batmans purifiés rendent à raison de dix-sept batmans :

Les vingt batmans, cinq mille cent, qui, vendus à Trébizonde, à 13 piastres le bat

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Peut-être que, depuis l'époque où j'ai dressé ce compte, les prix d'achats de cuivre, les frais auront augmenté; mais son prix, à la vente, aura nécessairement suivi la même proportion.

matière qui resteroit dans les fourneaux, étant purifiée de nouveau, serviroit à payer les ouvriers, et l'on obtiendroit le charbon à meilleur marché en l'achetant en grande quantité, et directement des seigneurs Turcs, propriétaires des villages où il se fait. Le cuivre est un article très-recherché à Trébizonde, et enlevé au comptant. Le négociant qui s'adonneroit à ce seul commerce, y trouveroit, à la fin de l'année, un bénéfice immense, soit en vendant une partie dans la ville même, soit en expédiant le reste en Europe, où ce cuivre seroit toujours plus estímé que celui de Tokat, quoique de la même qualité, parce qu'il est mieux purifié.

Départ d'Arzroum.— Route jusqu'à Baïbourd et GumuchKhâné.-Description de ces deux villes.-Arrivée à Tré

bizonde.

:

Le 27 février, j'allai prendre congé de YussufPacha, qui me remit une lettre pour le consul de France à Trébizonde, et me fit présent d'un fort beau shall de Cachemire, en me disant avec beaucoup d'affabilité Ce meuble servira à vous garantir du froid. Je remerciai ce visir des témoignages de bonté qu'il m'avoit accordés pendant mon séjour dans sa résidence, et je me retirai confus de l'aimable accueil que j'en avois reçu. Le voyageur n'a que trop souvent à se plaindre, en Turquie, de l'insolence et des marques de mépris des gouverneurs subalternes. Il n'en est que plus sensible aux égards et aux dispo

sitions bienveillantes, en général, des Turcs d'un rang élevé, qui ont surtout vécu dans la-capitale.

Un tatar du pacha de Trébizonde partoit le jour même pour retourner auprès de son maître. Il fut chargé de m'accompagner, et nous quittâmes ensemble le 28 la ville d'Arzroum, à onze heures du matin. La plaine étoit encore couverte de neige, les chemins en échelons et affreux, et nos montures, pour surcroît de malheur, détestables. Ce ne fut qu'avec peine, en allant au pas, que nous pûmes atteindre, au coucher du soleil, le village d'Aladjam, distant d'Arzroum de six lieues seulement.

Nous quittàmes ce village le 1er mars, à huit heures du matin; et, après deux heures et demie de marche dans la direction d'abord de l'est un quart nord, et ensuite droit à l'est, nous arrivâmes à celui d'Hermanu-Kei, composé de Turcs et d'Arméniens. Nous nous y arrêtâmes pour prendre un léger repas, et changer en même temps deux de nos chevaux contre deux autres qui ne valoient guère mieux.

A midi, nous dirigeant vers l'est-sud-est, nous montons une colline assez élevée, couverte de neige, et descendons ensuite dans un vallon, où l'on aperçoit un village; nous le laissons pour gravir une trèshaute montagne appelée Kiochapoun-Dágh, l'ancienne Scydisses, l'une des quatre principales de l'Arménie, et formant la séparation des eaux qui arrosent cette contrée. Nous avions quitté les versants du golfe Persique pour tomber dans ceux de la mer

Noire. Au sommet de cette montagne est le village de Kiochapoun-Gar: quoique nous n'eussions fait dans toute la journée que sept lieues, la fatigue dont nos chevaux étoient accablés, nous obligea d'y passer la nuit.

Le lendemain, 4 mars, nous quittâmes ce village : un vent impétueux souffloit, et le froid étoit excessif; la neige qui couvroit la terre ne laissoit apercevoir aucune trace du chemin. En descendant la montagne dans la direction du nord-nord-ouest, nous arrivons dans un vallon coupé par le Djorokh. Cette rivière, l'Acampsis des anciens, l'une des principales de l'Arménie, et que nous reverrons souvent dans le cours de ce voyage, prend sa source dans le KiochapounDagh: formée par des sources abondantes et plusieurs petits ruisseaux, elle est d'abord peu considérable; dans la plaine de Kart, elle se joint à une rivière appelée Organ, passe à Spir (1), à douze lieues au nord de Baïbourd, ensuite vers le nord

(1) Spir, capitale d'une contrée du même nom, composée de cent cinquante villages, peuplés de Turcs, et plus encore d'Arméniens, est un bourg d'une centaine de maisons. Il est dominé par une forteresse assez bien conservée, renfermant une trentaine d'habitations et plusieurs magasins; le Djorokh baigne le bourg, et sépare le pays de Spir d'avec celui d'Off, dont les montagnes sont à un mille de distance du fleuve, qui, dans cet endroit, est large et profond. A trois heures de Spir, au midi, est un monastère appelé SaintJean, et habité par trois religieux, où les Arméniens vont en pélerinage. Les divers villages renfermés dans la contrée

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