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seroit vouloir établir en principe que la France, par exemple, dans son intérêt même comme puissance, ne pourroit jamais aspirer à reculer ses frontières territoriales et sa ligne de douanes sans courir le risque de perdre son commerce et son industrie.

Or, de nos jours, nous avons vu Buònaparte agrandir le cercle de la France, et y comprendre successivement la Belgique, la rive gauche du Rhin, le Piémont, l'étendre jusqu'à l'Elbe, et placer ses barrières à d'énormes distances, sans que nos manufactures aient souffert par la concurrence de l'active industrie des peuples incorporés; et l'on ne peut disconvenir que, sans les grandes fautes qui marquèrent les derniers pas de l'ambitieux conquérant, il eût été possible que le continent de l'Europe, soumis momentanément à une seule influence, eût adopté le même système, en étendant à l'infini ses échanges, et que les douanes n'eussent eu leur surveillance à exercer que contre l'Angleterre, mesure qui reçut un commencement d'exé

cution par les décrets de Berlin et de Milan.

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Ce qui eût pu, sans inconvénient pour le commerce et l'industrie du continent, être le résultat de nos victoires, ne peutil pas s'établir d'une manière plus conforme aux voeux de l'humanité, par l'accord libre des souverains, sans que les intérêts de leurs peuples en souffrent? Ainsi se réaliseroit cette grande idée de liberté de commerce, si bien d'accord avec les besoins de l'époque.

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Au temps où Turgot et les économistes en parlèrent les premiers, elle pouvoit présenter les plus grands dangers, parce qu'alors notre industrie manufacturière étoit encore dans l'enfance. Aujourd'hui, ses vastes produits ne sont plus en rapport avec la consommation et avec les expor-tations restreintes, et la liberté de commerce est devenue pour l'Europe, je ne dirai pas nécessaire, mais indispensable. S'il en étoit autrement, elle n'eût pas été proposée par sir Hutchinson. Il n'a pu échapper à un administrateur aussi habilet

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qu'il ne suffit pas qu'une chose soit noble et grande, mais qu'il faut toujours qu'elle soit faite à temps et à propos.

Au surplus, je n'exclus pas l'Angleterre d'un pareil concours; loin de moi toute idée de rivalité et d'intolérance contre une nation à laquelle les sciences et les arts industriels ont de si grandes obligations! mais si un système de liberté générale de commerce étoit adopté, il seroit nécessaire de bien calculer les dispositions qui pourroient mettre les États du continent en situation de lutter, sans trop de désavantage, contre une nation qui exerce le monopole des denrées coloniales; qui possède dans toutes les parties du monde de si vastes domaines; qui exerce le plus grand ascendant sur tous les gouvernements de l'Europe, en se chargeant de leurs emprunts; dont les manufacturiers, riches en capitaux et en crédit, peuvent, sans inconvénient pour eux, vendre à long terme; chez qui le commerce est l'objet constant de l'attention du Gouvernement, et qui enfin règne sur les mers.

Si les peuples de l'Europe cessoient de s'isoler, si les grands intérêts du commerce déterminoient, entre eux plus d'affection, plus d'intimité; si un nouveau système de douanes, d'accord avec les progrès de l'int dustrie manfacturière, multiplioit les besoins réciproques; si enfin l'Angleterre, admise dans cette association, y trouvoit cette extension de débouchés qu'exige l'é tat de ses fabriques et de sa navigation, il seroit permis de croire qu'un gouvernement aussi éclairé, qu'une nation aussi avancée dans tout ce qui constitue la haute civilisation, cesseroit d'abuser de sa force maritime, et de tenir le commerce du monde sous son joug. Alors, sans aucun doute, l'Angleterre, adoptant la noble pen, sée du Dauphin, au moment où l'armée française entroit en Espagne, consentiroit, par un pacte solennel, à reconnoître la liberté des mers, et à admettre sur cet élément ce droit des gens qui, parmi les nations chrétiennes, parmi les peuples civilisés, garantit sur terre les propriétés particulières de toute préhension, au mi

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lieu des guerres les plus sanglantes. Ainsi, ses immenses flottes, au lieu d'être pour l'Europe un moyen d'oppression, ne seroient plus qu'un sûr garant d'une défense légitime, ou d'une juste protection contre la piraterie.

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Avec ce pacte, avec cette garantie, nos expéditions pour l'Amérique méridionale, sur laquelle se portent tous les regards, pourroient s'étendre, sans être exposées au danger d'être interrompues le jour où leur extension deviendroit pour la GrandeBretagne un objet d'inquiétude et de jalousie; et alors, comme en 1744, en 1756, en 1793 et en 1803, on ne seroit plus exposé à l'enlèvement instantané de tous nos bâtiments, sans déclaration de guerre, et à voir notre commerce et nos fabriques tomber aussitôt dans cet état de ruine, de bouleversement et d'inaction qui compromet le bonheur des peuples et lé'redes États.

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Sans cette garantie, le danger que je signale seroit d'autant plus grand pour la France, qu'elle se trouveroit, au commen

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