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nous éprouvâmes de la perte de cet ami. Longtemps administrateur des hôpitaux à Marseille, il y jouissoit de l'estime générale. Venu à Odessa pour y être associé d'une maison française, il avoit desiré m'accompagner pour connoître les ressources de commerce que présentoit la Géorgie; et il terminoit sa vie dans une terre étrangère, loin de sa femme et de trois filles distinguées par leurs qualités aimables, et dont il étoit le seul soutien.

M. Moro fut gardé la nuit par un prêtre Grec et par notre domestique Sicilien. Dès la pointe du jour, une foule de femmes, selon l'usage du pays, vinrent entourer le mort en poussant des cris et des sanglots. Dans l'après-midi, mon interprète, M. Guibal, arriva de Tiflis, où il étoit allé annoncer ce cruel événement au général en chef, et demander quelles étoient les formalités à remplir relativement au décès de M. Moro. Nous nous occupâmes alors des derniers devoirs à rendre à cet ami, et, parmi les cérémonies, nous n'oubliàmes point le repas obligé qu'on donne après l'enterrement aux prêtres et aux pleureuses.

Nous partîmes ensuite pour Tiflis, où notre arrivée inspira un véritable intérêt. Je fus obligé de rester quinze jours dans cette ville pour laisser

à tous mes malades le temps de se rétablir et de nous mettre en état de partir pour Bakou. Mais avant de décrire cette partie de mon voyage, je crois devoir donner la description de la Géorgie, parler de son agriculture, de sa population, et indiquer toutes les ressources que cette contrée présente aux négociants, depuis qu'un ukase impérial lui a accordé une franchise commerciale illimitée, moyennant un droit de cinq pour cent.

CHAPITRE V.

Limites de la Géorgie.-Sa division.-Détails historiques. -Cession de ce royaume à la Russie. -Difficultés de l'administration jusqu'au traité de Gulistan.-Le général en chef Yermoloff est nommé gouverneur général.—Caractère de cet administrateur. - Réunion des Kanats à la Géorgie.-Limites actuelles de cette contrée. Détails sur les frontières à établir entre la Russie et la Perse.

LA Géorgie proprement dite est située entre le 40° 30' et le 42° de latitude nord, et entre le 41° et le 43° longitude du méridien de Paris. Elle a pour limite : au nord, le mont Caucase; au midi, le Karabagh, le Ghendje, et une partie de l'Arménie ; à l'orient, le pays des Lesghis et le Noucha; à l'occident, l'Arménie, le pachalick d'Akhaltzikhe et l'Immirette.

La Géorgie se compose de trois provinces, la Kartalinie, la Kakétie et la Sumkétie. Quelquefois ces provinces ont été des royaumes dis

tincts.

Du côté du Caucase et de l'Immirette, la Géorgie a des défenses naturelles; mais vers l'orient et le midi, elle a toujours été ouverte, et facilement envahie : aussi, il est peu de pays qui, ayant subsisté depuis si long-temps comme royaume, ait éprouvé plus de variations dans sa puissance et dans son étendue.

Sans admettre l'existence de Kartlos, qui vivoit six générations après Noé, de son fils Mtskhethos et de leurs descendants, il suffit de reconnoître, avec presque tous les historiens, pour le premier roi de Géorgie P'harnavaz de Schinak❜harthli, qui vivoit peu après l'invasion d'Alexandre-le-Grand, pour convenir que ce royaume est l'un des plus anciens du globe.

M. Klaproth, qui a fait de si grandes recherches sur ces contrées, parle, à l'occasion de Mtskhethos, d'un roi, Mirian, qui régna de 265 à 318 de Jésus-Christ. Il cite Mirdet, en 375, comme le vingt-sixième roi; en 1304, un Ghiorghi pour le soixante- onzième; et Wagtang, célèbre par son code, qui a régné de 1703 à 1722, en étoit le quatre-vingt-quatorzième.

Quoi qu'il en soit, il seroit bien difficile d'écrire, je ne dis pas seulement l'histoire de tous ces rois, mais même celle d'un seul règne : le peu de notions qu'on pourroit réunir se trouvent

éparses dans les historiens Persans et Arméniens, ou dans ceux du Bas-Empire. Toutefois, au milieu de l'obscurité qui couvre les annales de la Géorgie, on ne peut s'empêcher d'admirer une nation qui, occupant un pays circonscrit, ouvert à des peuples puissants, ravagé par tous les conquérants de l'Asie, ne perd jamais que momentanément son indépendance, se conserve pendant plus de deux mille ans en royaume, et qui, pendant quatorze cents ans, reste chrétienne au milieu de contrées entièrement soumises à la religion de Mahomet. Nouchirwan, au commencement du règne de Justinien, fait la conquête de l'Ibérie, la Géorgie actuelle. Plus tard, elle fait partie des États de Mahmoud le Garnevide. Alep Arselan, cité comme un des plus grands rois de Perse, et qui unissoit la valeur à la générosité, le goût des lettres à celui des sciences, fit une invasion dans cette contrée, et y exerça une cruelle persécution contre les chrétiens; action qui souille sa vie, et que les écrivains mahométans considèrent comme la plus louable.

En 1305, la Géorgie fut ravagée plutôt que soumise par Tamerlan. En 1547, elle fut conquise par Tamasp. Chah-Abbas la reprit sur les Turcs, qui en avoient été les maîtres pendant vingt ans, et qui avoient construit la citadelle

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