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ces observations, et le dénuement d'hommes et d'argent dans lequel on laissoit la Géorgie, on pent dire que l'administration n'a pu se faire remarquer par quelques succès que depuis le moment où la paix générale en Europe, et le traité de Gulistan, signé entre la Russie et la Perse, ont permis à l'empereur Alexandre de s'occuper de ce royaume (1). C'est à cette époque que le général en chef Yermoloff, au retour de sa brillante ambassade à Teheran, fut nommé gouverneur général des provinces Russes au-delà du Caucase, de l'ancien royaume d'Astrakan, et des contrées situées entre la rive gauche du Don et le Caucase: il arrivoit en Géorgie précédé d'une haute réputation, et entouré d'un grand nombre d'officiers de mérite. Les deux généraux Williaminoff qui l'accompagnoient, étoient des hommes distingués, l'un dans l'ad

(1) Manstein, dans ses Mémoires, parle de l'empressement avec lequel la cour de Russie saisit l'occasion de faire à Thamas-Kouli-Kan la rétrocession du Ghilan et du Mazanderan, provinces sur la mer Caspienne, acquises par Pierre-le-Grand. Če prince, d'un génie si remarquable, avoit envisagé ces provinces sous le point de vue commercial; mais à sa mort, ses grands et utiles projets furent oubliés. Dès-lors on ne considéra plus ces pays que comme une possession onéreuse, où chaque année on perdoit sans utilité douze à quinze mille hommes et beaucoup d'argent. II. 2e édit.

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ministration militaire, l'autre comme chef d'étatmajor. De jeunes officiers des premières familles de la Russie s'étoient empressés de se ranger sous les drapeaux d'un général qui avoit déployé beaucoup de talents et de courage dans les terribles campagnes de 1812, 1813 et 1814, et ils n'avoient pas hésité à servir dans une contrée où jusqu'alors, à l'exception des officiers supérieurs, on n'envoyoit presque toujours que les militaires en disgrace.

Le général Yermoloff est d'une taille élevée et d'une force de corps prodigieuse, avantage que j'ai cru devoir citer, parce qu'il a contribué à la première impression de terreur que son arrivée a causée parmi les peuplades du Caucase, Bien différent des satrapes de l'Asie, il a les habitudes d'un Scythe. Méprisant le luxe de l'Orient, il voyage presque toujours dans une voiture non suspendue; il couche sur un simple tapis, et porte la sobriété jusqu'à l'excès. A côté de ces mœurs sévères, il réunit aux manières les plus distinguées une grande affabilité et un caractère plein d'obligeance; à la fois habile tactitien et bon littérateur, il passe alternativement de la lecture de Polybe et des ouvrages de stratégie à celle de Virgile et de Cicéron si l'on ajoute qu'il réunit à ces qualités une grande

fermeté, une scrupuleuse justice, le plus noble désintéressement, un grand amour pour ses souverains et sa patrie, on reconnoitra que l'empereur Alexandre ne pouvoit faire un choix plus propre à assurer la prospérité de ses provinces au-delà du Caucase et le bonheur de leurs peuples.

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Cet administrateur, en prenant possession de son gouvernement, ne s'est pas dissimulé combien il lui faudroit de soins et de temps pour établir l'ordre dans un pays qui, pendant plusieurs siècles, avoit été livré à de continuelles invasions, et où l'administration, comme les hommes, ne vivoient, pour ainsi dire, qu'au jour le jour. Dans la Géorgie proprement dite, le besoin dans lequel s'étoient sans cesse trouvés les seigneurs de recourir à leurs vassaux pour la défense commune, avoit produit chez les uns et les autres un caractère d'indépendance qui augmentoit la difficulté de l'administration, et la mettoit dans l'alternative, ou de perpétuer l'état d'anarchie par trop de douceur et de condescendance, ou de se faire hair par trop de sévérité.

La dernière invasion de Tiflis par les Persans, le pillage de cette ville et l'enlèvement de seize mille habitants, encore esclaves à Teheran et dans d'autres villes de la Perse, avoient causé la

ruine d'un grand nombre de Géorgiens. La plupart, accoutumés à une vie aventureuse sous leur roi Héraclius, n'avoient encore nul attachement pour un Gouvernement qui, il est vrai, les mettoit à l'abri des invasions étrangères, mais qui aussi les condamnoit au repos, et ils se voyoient ainsi obligés de renoncer aux armes et à la gloire.

Le général en chef ne tarda pas à découvrir ce trait du caractère national. Les guerres avec les montagnards lui donnoient les moyens d'occuper les princes Géorgiens, les plus impatiens de leur inaction, et les plus portés au métier des armes. Il leur donna de l'emploi, des grades, des commandements, et joignant à ces dispositions, en faveur de la classe élevée, tous les encouragements propres à assurer la prospérité de l'agriculture et du commerce, il a changé insensiblement l'aversion de ces peuples dans une sorte d'affection pour leur nouveau sou

verain.

La Russie, en se mettant en possession de la Géorgie et de l'Immirette, avoit conservé dans les provinces cédées par la Perse les droits des princes régnants. Le Chirvan, le Karabagh, le Noucha étoient gouvernés par leurs anciens kans, qui reconnoissoient l'empereur Alexandre

pour leur suzerain, mais qui n'avoient rien changé à leurs anciennes lois et à leurs coutumes. La Russie s'étoit bornée à placer des postes de cosaques sur toutes les routes, et à soumettre l'exécution des jugements portant peine capitale à sa ratification : disposition bienfaisante qui honore le souverain de ce vaste empire.

Un tel état de choses occasionnoit beaucoup de confusion et de difficulté dans l'administration, et en même temps il environnoit l'armée Russe de périls, à cause de l'intimité des liaisons qui régnoient entre ces divers kans et les souverains de la Perse, dont ils étoient les alliés et les coreligionnaires.

Au milieu de ces obstacles, les améliorations pouvoient difficilement s'étendre au-delà de la Géorgie proprement dite, et le Gouvernement devoit nécessairement manquer d'ensemble tant que les cantons administrés par la Russie seroient entremêlés de contrées soumises à d'autres lois et à un régime différent.

Ainsi, pour citer un exemple entre un grand nombre d'autres, avant la promulgation de l'ukase du 8-20 octobre 1821, les marchandises fabriquées en Perse payoient à Bakou vingt-cinq pour cent de droit d'entrée, pendant que dans

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