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Caspienne, les magasins, les forges, les corderies, l'hôpital, tout ce qui constitue l'établissement d'une marine impériale, et tel que Pierrele-Grand étoit capable de le concevoir.

usages,

les

La population d'Astrakhan s'élève à quarante ou quarante-cinq mille âmes, réunion de toutes les nations de l'Asie, de tous les peuples de l'Europe. Au milieu des différences que présentent le costume, le langage, les les mœurs, la religion de tant de peuples divers, on ne peut assez admirer l'accord parfait qui règne entre tant d'hommes appartenant autrefois à des gouvernements différents, presque toujours en état de guerre, et qui ont abjuré leur haine et leur rivalité sous un souverain qui leur accordé à tous une protection égale.

On peut évaluer à vingt mille âmes les Russes - établis à Astrakhan : le plus grand nombre s'occupe de commerce. On trouve parmi eux des ouvriers de tous les états : les marchands y sont généralement riches. On peut difficilement se faire une idée de la quantité de voitures qui se réunissent les jours de grandes solennités, comme aux fêtes de Pâques. Les femmes se distinguent alors par la richesse de leurs vêtements; leurs robes sont de brocard d'or et d'argent; leur tête, leurs bras, leur

leur cou,

ceinture, sont garnis d'une grande quantité de perles, de diamants et de pierres précieuses. Les Russes d'Astrakhan ont conservé les mœurs anciennes : le plus grand nombre portent la barbe; ils s'abstiennent de fumer, et repoussent toute innovation. Parmi eux on trouve beaucoup d'hommes de la secte qu'on nomme raskolniks, ou vrais croyans.

Les Tartares fixés à Astrakhan sont au moins au nombre de dix mille; ils descendent presque tous des conquérants de cette contrée. L'éducation des chevaux et des bestiaux est leur occupation principale. Ils sont aussi commerçants et voituriers, et jouissent généralement d'une grande réputation de probité. Il en est un grand nombre auxquels on peut confier en toute sûreté le transport des soies, des cotons et des autres riches productions de l'Asie, qu'on expédie pour Moscou ou pour la foire de Makariew. On peut s'arranger avec des Tartares lorsqu'on veut aller d'Astrakhan à Taganrog ou à Mozdok, en passant par les déserts. Il n'en coûte pour six chevaux que 360 roubles assignations; mais sur une route de deux cents lieues, on ne trouve pas une seule ville, pas une seule habitation: on ne rencontre de distance en distance que des hordes nomades avec leurs troupeaux. On

voyage comme dans les premiers siècles du monde; on couche sous des tentes, on s'arrête près des lacs ou des sources.

C'est sur le chemin d'Astrakhan à Mozdok qu'on trouve près de la Kouma les ruines de l'ancienne ville de Madjar, dont Pallas et M. Klaproth parlent dans leurs voyages, et qui, dans le temps du commerce des Vénitiens à Tana, servoit de lieu de passage et d'entrepôt pour les marchandises qui étoient transportées de l'embouchure du Terek sur la mer d'Azow. Tous les Tartares établis à Astrakhan sont mahométans sunnites ; ils y ont une très-belle mosquée. Les Tartares n'étant plus dans un continuel état de guerre avec leurs voisins, ni forcés de défendre à main armée la jouissance de leurs pâturages, n'ont rien conservé de leurs anciennes mœurs barbares. Ils ont aujourd'hui toutes les vertus des peuples pasteurs; ils ont perdu tous les vices des peuples guerriers.

Ces Tartares, d'un caractère doux et tranquille, descendent cependant de ces Tartares qui, sous la conduite de Tamerlan, portèrent leurs armes depuis le golfe Persique jusqu'au Caucase, depuis l'Euphrate jusque dans l'Inde, et qui partout se signalèrent par leurs cruautés. Ce Tamerlan, qui a trouvé un historien et un

panégyriste, donne l'idée de ce que sont les Musulmans victorieux.

Malcolm, dans son Histoire de Perse, dit que, lorsque l'armée Tartare, que commandoit Timour (Tamerlan ), arriva devant Dehli, elle avoit plus de cent mille prisonniers enlevés dans l'Afghanistan et dans le Moultaz. Timour ayant résolu de faire le siége de cette ville (1), il jugea << que l'opération pourroit se trouver embarras »sée par le nombre des captifs : un ordre fut » donné pour les tuer, et l'on menaça d'une >> terrible punition toute personne qui tenteroit >> d'éluder la barbare ordonnance. On croit qu'il » n'échappa pas à la mort une seule des cent » mille victimes. L'histoire du genre humain ne >> peut fournir aucun autre exemple d'une si >> affreuse cruauté commise ainsi de sang-froid. >> Cependant le personnage qui l'a commise a été >> vanté par les historiens et les poëtes comme >> un demi-dieu, et plusieurs de ces écrivains, >> non contents de lui attribuer cette valeur, » cette politique et cette habileté militaire qu'il » possédoit certainement, l'ont célébré pour ses >> vertus sans nombre, et sortout pour sa clé» mence et sa justice. »

(1) Histoire de la Perse, par Malcolm, tom. 2, pag. 217. 2e édit.

II

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Tel est l'esprit des Musulmans conquérants ou chefs d'empire. Je les ai vus soumis sur les bords du Wolga, sur ceux de la mer Caspienne; j'ai vu les Nogaïs eux-mêmes, à peine devenus sédentaires, et il ne leur restoit plus aucune trace de leur caractère féroce.

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y

A côté de ces Musulmans sectateurs d'Omar, a à Astrakhan environ quatre mille Persans de la secte d'Ali. Ils sont tous marchands, et reçoivent les productions de la Perse et du centre de l'Asie que leur envoient leurs correspondants d'Asterabad, d'Enzili et de Bakou. J'ai parcouru leurs bazars; mais comme nous n'étions qu'à l'entrée du printemps, et au moment des miers arrivages, ils étoient peu approvisionnés en soie, en coton de Boukharie et du Mazanderan, et en châles de Cachemire.

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Les Persans qui vivent à Astrakhan sont habillés avec une sorte de luxe, et ont un air d'aisance et de bonheur qui contraste avec la misère excessive dont ils offrent le spectacle dans leur propre pays. Là, ils gémissent sous la plus affreuse oppression, et sont forcés d'afficher la pauvreté, pour ne pas être exposés à voir aggraver leur sort. Ceux-ci, instruits du sort heureux de leurs compatriotes en Russie, manifestent quelquefois le desir de changer de domination.

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