Изображения страниц
PDF
EPUB

M. le lieutenant-colonel Johnson, dans son voyage de l'Inde en Angleterre par la Perse et la Géorgie (en 1817), cite à ce sujet un fait si extraordinaire dans un pays despotique, que je crois devoir transcrire textuellement sa narration.

(( Il y a quelques jours, dit-il, Sa Majesté tra» versoit à pied les bazars, lorsqu'un marchand » sortit de sa boutique, et lui dit : Votre Majesté >> connoît peu les souffrances des pauvres dans >> ce moment; pendant que vous vivez dans >> l'abondance, nous ne pouvons nous procurer >> du pain : tous les grains, au moment où ils >> arrivent de la campagne, sont achetés par >> des gens riches, qui, malheureusement pour >> nous, sont toujours protégés. Ils sont ensuite » enfermés dans des magasins, d'où on ne les >>> tire que par petites quantités presque insuffi>> santes à la consommation, et qu'on vend alors » à des prix exorbitants. Au nom de Dieu, ne » soyez pas sourd à nos cris, et secourez vos >> sujets qui meurent de faim. Le roi écoute >> attentivement ses plaintes, et, après lui avoir >> fait quelque réponse peu satisfaisante, il con»tinue sa route, accompagné d'un nombreux >> cortége, parmi lequel étoit son fils le prince » Ali-Mirza. Le marchand désespéré s'écria:

>> Que les Russes se rendent maîtres de ce >> royaume, pour le soulagement des pauvres! » Le prince Ali-Mirza, qui est commandant de » la forteresse de Téheran, entendit cet homme, » et en passant il le regarda long-temps et fixe>>ment, comme pour graver ses traits dans sa » mémoire et pour le reconnoître. Cependant >> cette affaire n'eut pas de suite, et le marchand »> ne fut jamais inquiété. »

Des Hindous, au nombre de deux cent cinquante à trois cents, presque tous du Moultan ou du Lahor, habitent près du quartier des Persans. Ils sont établis dans cette contrée de temps immémorial; ils y arrivent ordinairement à l'âge de vingt ou vingt-cinq ans, et laissent leurs femmes dans l'Hindoustan. A leur mort, il arrive toujours des héritiers qui se présentent comme leurs fils, souvent même lorsqu'il n'existe aucune possibilité physique dans une pareille filiation. Les Hindous, dont le teint est généralement basané, ont les traits réguliers, et leurs regards ont une expression de douceur très-remarquable, et qui n'est, au surplus, que la fidèle image de leurs goûts simples et de leurs mœurs. Ce peuple paroît n'avoir que deux passions, celle des fleurs et celle de l'or. On trouve dans leurs cours des parterres parsemés de fleurs; ils en

portent toujours à la main, et ne manquent jamais d'en offrir lorsqu'on leur fait une visite. Leur passion pour l'or n'est pas mois grande : ils le comptent sans cesse, ils le contemplent. Les jours de fête, ils l'étalent devant tous ceux qui viennent les voir.

Les Hindous reçoivent du Lahor des mousselines et d'autres étoffes; ils commercent avec intelligence, vivent avec économie, et sont généralement riches. Ce qu'on appelleroit usure en Europe, est regardé en Asie comme un intérêt légitime. Dans cette partie du monde exposée à des envahissements, aux conquêtes et à toutes les vexations intérieures, nul homme n'est sûr ni de sa fortune, ni de son existence, et ainsi les intérêts d'un prêt fait à un particulier, quelque riche qu'il soit, se considèrent comme se composant de l'intérêt de l'argent, et de la prime d'assurance pour le risque qu'on court. C'est sans doute par suite des habitudes contractées en Asie, que les Hindous fixés à Astrakhan prêtent leur argent depuis deux jusqu'à quatre pour cent par mois, sur dépôt de marchandises; et les bénéfices qu'ils retirent de ces opérations usuraires ne forment pas la moindre partie des capitaux qu'ils accumulent.

Il y a à Astrakhan et dans les villages en

vironnants un très-grand nombre de Calmouks; ils possèdent beaucoup de chameaux, de chevaux, de bœufs, et de grands troupeaux de moutons de l'espèce nommée chamtouk. Comme les Tartares, ils s'engagent volontiers pour soigner les bestiaux, mais jamais pour le labourage. Ce peuple, originaire de la grande Tartarie, étoit autrefois extrêmement nombreux. Il compte parmi ses princes le fameux Gengiskan, et son petit-fils le grand Batou

kan.

Dans le seizième siècle, ces Tartares se nommoient d'Aidor, et se divisoient alors en plusieurs hordes. Les quatre plus grandes s'étant ensuite réunies, on donna le nom d'Éleutes, mongol, et de Calmouks ou Calmaks, en tartare, qui signifie restés, à ceux qui ne voulurent pas s'y joindre. Ces Calmouks se divisèrent eux-mêmes ensuite en quatre hordes, dont l'une, sous la conduite d'un frère de Gengiskan, habita longtemps les environs du Thibet; une autre, qui erroit sur les frontières de la Chine, se rendit redoutable à cette puissance vers le milieu du dernier siècle. Les deux dernières s'avancèrent successivement vers l'Oural et sur les bords du Wolga, où elles vivoient sous la protection de la Russie. Leurs tribus nombreuses parcouroient

les immenses plaines qui s'étendent de l'Oural à la mer Caspienne et à la mer Noire.

Le 3 janvier 1781, sous la conduite d'Oubachi, régent pour les enfants en bas âge de ce fameux Dundone-Ombo, dont Manstein cite avec tant d'éloge les faits militaires, vingt-huit mille familles ou tentes (1) de Calmouks abandonnèrent le territoire de la Russie, où elles avoient éprouvé quelques vexations, et se réfugièrent dans les provinces de la Chine. Mais au lieu d'y trouver un sort heureux, les chefs en furent massacrés, et les sujets dispersés dans tout l'empire. Il ne restoit en 1806 que quarante mille Calmouks environ sur les deux rives du Wolga, et dans les plaines qui séparent la mer Caspienne de la mer Noire. Le nombre en est aujourd'hui beaucoup plus étendu. D'après le recensement qui a été fait en 1806, ils possédoient :

Cinquante-sept mille quatre cent soixantetrois chameaux;

Deux cent trente-un mille cent six chevaux;

(1) Chaque famille, parmi les Calmouks et les peuples nomades occupant une tente, lorsqu'on veut calculer la population, on dit indifféremment une tente ou une famille.

« ПредыдущаяПродолжить »