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premières werstes, étoit absolument plate et mal cultivée. C'est vers ce point qu'on aperçoit à sa droite, et à quelques centaines de pas du chemin, une mosquée assez considérable bâtie en pierres, et entièrement isolée. Sur la gauche, il existe dans le lointain une autre mosquée.

Les Tartares qui habitent Ghendjé assurent qu'un Arménien convaincu de l'excellence de leur religion, s'étant fait Musulman, fut assassiné par ses anciens coreligionnaires, qui ne pouvoient lui pardonner son apostasie. Une des mosquées fut construite sur le lieu même où s'étoit consommé son martyre; l'autre fut destinée à honorer sa mémoire, et son corps y est enterré.

Quinze werstes avant d'arriver à Kourgouloutchaï, on traverse un bois assez touffu; les arbres y sont tortus et chétifs. Les grenadiers sont plus communs; ils étoient alors couverts de fruits. De temps en temps, on apercevoit quelques plantations de cotonniers : le duvet en étoit court et peu soyeux.

Le poste des cosaques est près d'une chaîne de montagnes sablonneuses qui borde sans interruption la rive gauche du Kour, à une distance plus ou moins rapprochée de ce fleuve. Ce poste est situé dans une plaine marécageuse où

l'air est malsain. Le sous-officier qui le commandoit étoit un très-bel homme. Sa figure annonçoit le peu d'influence du climat sur sa robuste constitution: il fut plein d'attentions pour nous.

Le lendemain, vers sept heures, nous partîmes pour Mengatchaour, distant de vingt-deux werstes de Kourgouloutchaï, où nous avions passé la nuit. Nous fimes ce trajet en quatre heures. Le pays que nous parcourions étoit plat comme celui que nous avions traversé la veille. Les arbres et les arbustes y étoient beaucoup plus multipliés. A la droite du chemin, le sol, un peu plus bas que la chaussée, étoit couvert d'une légère couche de sel extrêmement blanc, qu'on trouve sur un grand nombre de terres de cette contrée. Dans les montagnes voisines, et près du Kour, les mines de sel sont extrêmement abondantes. Les unes sont brillantes et transparentes comme le plus beau cristal de roche; les autres sont opaques, très-blanches, et ont le grain très-fin. J'en ai vu de pareilles en Catalogne, provenant des mines de Cardone.

Le poste de Mengatchaour est situé sur la rive droite du Kour. Ce fleuve, si rapide à Gori, où nous ne l'avions traversé à gué qu'en courant les plus grands dangers, et encore plus ra

pide à Tiflis, est ici extrêmement tranquille, et son cours est d'une lenteur qui nous eût étonné, si nous ne l'eussions pas cotoyé dans une immense plaine de deux cent cinquante werstes de longueur. Le Kour est, dans presque toute cette étendue, bordé par deux chaînes de montagnes : l'une située à gauche et très-rapprochée, mais d'une foible élévation; l'autre, assez éloignée, située sur la droite, et beaucoup plus élevée. Par suite de cette position, ce n'est qu'après les pluies d'orage que les eaux du Kour, grossies par les torrents, reprennent leur rapidité primitive, et alors les sables, entraînés avec violence, forment partout des écueils qui suffiroient pour gêner la navigation, s'il en existoit une sur ce fleuve.

A Mengatchaour, on a établi une pêcherie qui est affermée par la couronne. On y prend beaucoup de poisson, particulièrement l'espèce d'esturgeon nommé assétine. Le dos de ce poisson en est la partie la plus délicate; on en coupe le long des vertèbres deux filets de deux pieds, et quelquefois de trois pieds de longueur, sur une épaisseur assez forte. On les sale et on les fume. Nous achetâmes six filets d'assétines pêchés le matin même, moyennant 3 abazes (2 fr. 40 cent.). Le passage du Kour sur ce point, et

deux autres passages dans la province du Chirvan, sont affermés moyennant 2,150 ducats par an. Après avoir traversé le fleuve dans un bac construit avec soin, nous cotoyâmes une trèsbelle forêt de chênes et de hêtres d'assez fortes dimensions: les noyers, les figuiers et les grenadiers y étoient très-multipliés. La vigne sauvage entouroit la plupart de ces arbres. A notre gauche, l'aridité du sol contrastoit avec la verdure de la forêt que nous avions à notre droite. Le chemin étoit bon, et une heure et demie nous suffit pour arriver à Tchamaïs, distant de quinze werstes de la poste que nous venions de quitter.

Tchamaïs est dans une jolie position, sur les bords d'un ruisseau, et à l'extrémité de la forêt d'où nous sortions. Ce ruisseau semble être la ligne de démarcation entre le pays stérile et desséché que nous parcourions depuis huit jours, et le pays fertile dans lequel nous entrions, et dont la verdure réjouissoit notre vue, qui n'y étoit plus accoutumée.

De Tchamaïs, où nous couchâmes, jusqu'à Gourgane, on ne comptoit autrefois que vingtet-une werstes on en paye aujourd'hui trentecinq. La différence provient de ce que, dans le principe, lorsqu'il fut question de fixer les dis

tances, l'ingénieur chargé de ce travail crut que, dans une plaine unie et qui ne paroissoit offrir aucun obstacle, il pouvoit calculer sa route en ligne droite; mais dans un kanat, où chaque mélit ou prince étoit tout-puissant, la route a été tracée dans la seule convenance des propriétaires; et les détours qu'on lui a fait faire en ont beaucoup augmenté la longueur. Depuis cinq mois seulement, le kan de Nouka ou de Cheki, qui toléroit ces abus, est mort sans enfants, et ses domaines sont devenus le patrimoine de la Russie. On doit donc s'attendre que bientôt l'administration donnera l'ordre de tracer la route entre Tchamaïs et Gourgane, de manière à épargner aux voyageurs beaucoup de temps et surtout de mauvais passages.

A sept ou huit werstes de Tchamaïs, on rencontre un village tartare, dont les habitations, comme toutes celles de ces contrées, sont entièrement cachées au milieu de très-beaux arbres fruitiers et forestiers. Près de ce village, on voit une grande mosquée bâtie en pierre; une werste plus loin, on aperçoit un tombeau, dont le dôme est placé sur une voûte ouverte d'un seul côté. Cette tombe ressemble à celle que nous avions remarquée en sortant d'Élisabeth-Pol.

Une werste avant d'arriver à Gourgane, on

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