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fortifiée par Nouchirvan, qui en a fait un des boulevards de la Perse, et qu'ayant été prise par les Arabes, le célèbre calife Haraoun-Al-Raschid y a résidé, et l'a embellie. Depuis cette époque, elle s'est ressentie des révolutions de la Perse, et a souvent changé de souverains. Pierre-leGrand s'en empara en 1722: elle fut ensuite rendue aux Persans, gouvernée par les kans du Daghestan, et enfin reprise par les Russes en 1795. Depuis ce temps elle fait partie de ce vaste empire.

J'arrivois malheureusement à Derbent tellement souffrant de la fièvre, qu'il me fut impossible de visiter la ville et ses environs avec l'attention qu'ils méritoient. Ma description sera donc un peu succincte.

La muraille qui, de la ville, s'étendoit jusqu'à la mer, et qui défendoit la Perse et la Géorgie contre les incursions des Scythes et des peuples guerriers du Caucase, se prolongeoit le long des montagnes. C'étoit vraisemblablement près de la ville que se trouvoit le défilé étroit où l'on avoit placé ces portes de fer de quatorze pieds de largeur, et qui, dit-on, sont les mêmes que celles que nous avons vues à quinze werstes de Kotaïs, au monastère de Gaelaeth.

Derbent est éloigné d'environ quatre werstes de la côte de la mer Caspienne, qui, sur ce point, n'a ni anse ni baie aussi cette ville n'at-elle aucune navigation, et son commerce est-il très-circonscrit.

Indépendamment de la soie qu'on récolte, et dont la qualité est assez médiocre, les terres des environs de cette ville produisent beaucoup de safran, qu'on vend en tablettes comme celui de Bakou; mais il a la réputation d'être plus pur, et de n'être mêlé d'autre substance étrangère que d'huile de sesame. On récolte aussi dans le Daghestan beaucoup de garance sauvage. Des Arméniens ont commencé à cultiver cette plante, et leur essai a été couronné d'un plein succès: il est à souhaiter qu'ils aient beaucoup d'imitateurs, et alors cette production deviendra pour cette contrée un objet de commerce très-important.

Nous avions des lettres de recommandation pour le commandant de Derbent. Il nous logea chez un prince Persan, major au service de Russie. Sa maison étoit bâtie avec beaucoup de régularité; de chaque côté d'une cour carrée étoient placées les cuisines, les écuries et quelques chambres pour les domestiques. Le bâtiment du fond renfermoit le logement du maître,

qui étoit placé au premier étage. Le rez-dechaussée, précédé par une galerie ouverte, est destiné au service. La boiserie de l'intérieur de l'appartement étoit sculptée avec soin et même avec goût; mais l'usage des fenêtres, des verres à vitres et des serrures y paroît encore inconnu. Le propriétaire, qui nous avoit abandonné sa maison, nous envoyoit des provisions de toute espèce, et son attention s'étendoit à tous nos besoins. Le temps commençoit à devenir froid, et il nous fit prodiguer le bois de chauffage. Les cheminées sont étroites, cintrées en ogives: on y met le bois debout, au lieu de le coucher, moyen assuré d'obtenir une grande chaleur.

Nous nous trouvions à Derbent à l'instant où les Persans célébroient l'anniversaire de la mort d'Hussein, gendre d'Ali, un de leurs martyrs. Les cérémonies commençoient à six heures du soir, et duroient jusqu'à onze. On ne peut se faire une idée du bruit effroyable qui les accompagnoit : il nous donna une haute opinion de la ferveur des Musulmans de Derbent. Tant de voyageurs ont décrit ces scènes extraordinaires que je crois inutile d'en parler.

Les vivres sont à Derbent encore à meilleur marché qu'à Tiflis, à Elisabeth-Pol et à Bakou. Pour 6 ou 7 copecs, on nous vendoit une

livre de très-bonne viande, et presque toutes les autres denrées dans la même proportion. Les bazars étoient assez bien fournis en marchandises de la Perse et de l'intérieur de l'Asie, ainsi qu'en produits de l'industrie des Tartares et des peuples des montagnes. Les fourrages seuls étoient très-chers, à cause de la grande sécheresse de l'été, comme dans tous les pays que nous avions parcourus depuis un mois.

Le général de Wrède nous avoit recommandés à deux frères Arméniens qui lui servoient d'interprètes lorsqu'il venoit à Derbent. Ils nous donnèrent des preuves d'une grande intelligence et de beaucoup d'honnêteté.

Je n'ai trouvé à Derbent personne qui s'occupât d'histoire, d'antiquités et de médailles; et, malgré toutes mes questions, j'avoue que je n'ai rien pu recueillir de nouveau ni d'intéressant sur cette ville. Cependant le général Vlassoff m'avoit parlé d'une notice manuscrite écrite en russe et en français sur Derbent; mais j'ai fait de vaines recherches pour me la procurer.

La population de Derbent est de sept ou huit mille âmes, dont les deux tiers sont Persans. On y compte, indépendamment de la garnison et de l'administration russe, six ou sept cents Arméniens, deux ou trois cents Juifs, et quelques

Arabes descendant de ceux qui envahirent la Perse dans les premiers temps du mahométisme.

Avant mon départ de Tiflis, le général en chef avoit donné ordre au général de Wrède de réunir à Derbent un convoi de cent hommes d'infanterie, de quelques cavaliers, et de deux pièces d'artillerie, qui devoit se rendre de Derbent à Kizlar, et nous devions profiter de cette escorte. Il avoit eu en même temps la bonté de nous remettre des lettres de recommandation pour le tchamkal de Tarkou, et pour les autres princes Tartares que nous devions rencontrer sur notre route. C'étoit beaucoup plus qu'il n'en falloit pour nous garantir de tout danger; car les deux dernières campagnes des Russes dans le Daghestan, et notamment la prise de la forteresse de Coserek, qui fut enlevée d'assaut, avoient répandu parmi les peuples de cette contrée la terreur des armes russes, et avoient augmenté parmi les montagnards le nombre de ceux qui, fatigués d'un état de guerre continuelle, sans aucun avantage pour eux, desiroient franche

ment se soumettre.

Le convoi avoit été composé de soldats de divers régiments qui étoient réformés ou alloient à Stavropol pour y chercher des farines de seigle

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