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lines peu élevées, et des ravins dont le passage ne nous offroit aucune difficulté. La caravane marchoit lentement; parfois elle s'arrêtoit pour laisser aux traînards le temps de rejoindre.

Après avoir parcouru environ vingt-une werstes, on s'arrêta pour déjeûner et faire rafraîchir les chevaux dans un joli pâturage entouré d'arbres, et près duquel il y avoit une mare dont l'eau étoit assez mauvaise; mais dans tout ce pays, souvent on n'en trouve pas d'autre. Nous avions employé sept heures pour faire vingt-une werstes : c'étoit moins d'une lieue de poste par heure. La position du pays obligeoit presque toujours de marcher sur une ligne, et il en résultoit qu'il y avoit souvent plus d'une werste de distance entre la tête et la queue du convoi.

La prairie où nous avons fait halte est voisine du village de Tarkali-Ousen, qui est peuplé de cultivateurs, et où on fabrique aussi quelques tapis. La consommation des produits de cette industrie pourroit s'étendre en Russie, et ils deviendroient ainsi un article important d'exportation.

Après trois heures de repos sous la tente, nous nous remîmes en route vers les dix heures. On marcha un peu moins lentement que pendant la

nuit; la surveillance étant plus facile et les haltes moins nécessaires, on peut calculer que nous parcourions quatre werstes à l'heure, et évaluer ainsi à seize werstes la distance qui sépare la prairie où nous nous étions arrêtés le matin, de celle où nous campâmes de nouveau vers deux heures.

La route s'éloignoit peu à peu de la mer Caspienne, et se rapprochoit des montagnes du Caucase c'étoit une véritable steppe, ressemblant parfaitement à toutes celles de l'ancienne Scythie. Nulle part la moindre colline n'interrompoit la surface unie de la plaine; mais cette steppe se distingue de celles d'au-delà du Caucase par des bouquets d'arbres qu'on y apercevoit de temps en temps. Depuis Derbent jusqu'à Angiourte, nous vîmes beaucoup de canards et d'oies sauvages, et un des officiers du convoi, grand chasseur, en tua un assez grand nombre: ces plaines renferment aussi beaucoup de cerfs et de gérames.

que

Après deux heures de repos, nous partîmes pour Angiourte, dont nous n'étions plus éloignés d'environ treize werstes. Bientôt nous vîmes arriver au grand galop les deux jeunes princes de Tarkou, leur gouverneur, et les nombreux cavaliers qui les entouroient. Nous étions loin

de nous attendre à cette nouvelle preuve d'attention : elle étoit la suite de l'ordre qu'avoit donné le tchamkal de ne nous quitter qu'à Kasiourte, frontière de ses Etats. Un Tartare, de la suite des princes, nous remit trois caisses remplies de gâteaux pour notre route. Il y en avoit tant que, malgré nos distributions fréquentes, cet approvisionnement ne fut entièrement consommé que le jour de notre arrivée à Astrakhan : les Tartares excellent à faire cette espèce de pâtisserie.

La ville et le canton d'Angiourte avoient pour chef le frère du gouverneur des jeunes princes. Ce Tartare, d'une corpulence remarquable, avoit une figure franche et honnête; il nous reçut à merveille. L'appartement où il nous logea étoit abondammment pourvu de tapis, de coussins et de couvertures de coton, luxe des Orientaux. Nous eûmes le temps de nous y reposer, le convoi ne devant se mettre en route que le lendemain à huit heures.

La maison que nous occupions étoit à mi-côte, dans une position agréable. La vue de la campagne que nous avions devant nous étoit animée par le mouvement continuel des gens qui composoient la caravane, tous logés ou campés dans les environs de notre demeure. En arrivant, nous

avions reçu la visite des Tartares qui avoient accompagné les jeunes princes. Le chef du village prodiguoit les approvisionnements de toute espèce je n'ai jamais vu l'hospitalité exercée aussi généreusement que dans cette contrée. Pendant l'année 1820, le général en chef Yermoloff ayant séjourné, avec un corps d'armée assez nombreux, dans les Etats du tchamkal, ce prince pourvut avec profusion à tous les besoins de la troupe; ses attentions délicates pour le général en chef et pour son état-major, furent comparables à tout ce qu'on auroit pu attendre dans le pays le plus civilisé de l'Europe.

Nous partîmes le lendemain à huit heures pour Kasiourte, qui n'est qu'à trente werstes d'Angiourte. La route est partout généralement bonne; le terrain est plat, uni et peu cultivé; les villages deviennent plus rares, et sont à de grandes distances du chemin. On est éloigné de la mer, et cependant, à gauche, on découvre à peine quelques traces des hautes montagnes du Caucase: de ce côté, elles paroissent se terminer à pic, et laissent entre elles et la mer Caspienne une large plaine.

Dans l'antiquité la plus reculée, comme de nos jours, cette plaine laissoit l'Asie ouverte à l'invasion des peuples guerriers qui habitoient

les immenses steppes situées en-deçà du Caucase. Ce chemin est celui que suivirent les Scythes, lorsqu'ils poursuivoient les Cimmériens; c'est par-là que Pierre-le-Grand passa, lorsqu'il partit pour la Perse avec Catherine, le 15 mai 1722, menant avec lui une armée de vingt-deux mille hommes d'infanterie, neuf mille dragons, et quinze mille cosaques. Une partie de cette armée étoit dans des navires qui avoient été construits sous sa propre direction à Astrakhan, et sur d'autres points du Wolga. Il partoit pour venger le meurtre de ses sujets massacrés dans le vieux Chamakhie, dont les immenses ruines m'ont causé une si douloureuse impression.

Tout le pays que nous parcourions depuis six jours seroit sûrement mieux cultivé et plus habité, si le défaut de débouché et de commerce, et si l'état continuel d'hostilité de ces peuples entre eux et contre la Russie, ne s'opposoient à toute amélioration.

La sécheresse de cette année n'avoit laissé dans ces cantons aucun fourrage pour les troupeaux; le tchamkal, dont le territoire se termine sur les rives du Soulak, dans lequel M. de Sainte-Croix me paroît avec raison avoir reconnu le Joana de Ptolomée, avoit été réduit à demander au scheffy, souverain des Tartares

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