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vainqueurs a pénétré même parmi le peuple, puisqu'en 1120, c'est-à-dire 54 ans après la conquête, nous voyons le célèbre prédicateur, Vital de Savigny, prêcher en français dans les églises de Londres, en présence de nombreux auditeurs de toutes les classes de la société. Les progrès furent si rapides, que bientôt la colonie fut plus habile que la mère-patrie; on composait en Angleterre des ouvrages de longue haleine, lorsqu'à peine on bégayait le français à Paris. Parmi les ouvrages de cette époque écrits en français, on peut citer ceux de Robert Wace, clerc-lisant des rois Henri Ier et Henri II, auteur du Brut d'Angleterre ou Artus de Bretagne, roman en vers, achevé en 1155; du roman du Rou ou Rollon, le plus célèbre de tous les romans de la Table-Ronde. Ces deux romans en vers forment, pour ainsi dire, l'histoire primitive de la monarchie anglaise; l'abbé Pluquet qui, en 1827, a donné une édition du second, dit qu'il renferme 16,540 vers, de différentes mesures; pour le style il est nul, c'est un amas de rimes accumulées sans aucune règle et sans talent. Le seul mérite de cet ouvrage est une sorte de bonne foi naïve, caractère de l'époque, non-seulement en Angleterre, mais dans presque toute l'Europe; un peu plus tard, vers 1250, nous trouvons aussi à la cour d'Angleterre Marie de France, auteur de lays et de fables, translatées du Grin d'Ysopet (Grec d'Esope); les moines seuls continuaient dans leurs chroniques en vers la culture de la langue nationale, mais déjà, à cette époque, leurs compositions révélaient les empiétements du français. Les principaux ouvrages saxons des moines de cette époque (1200) consistent surtout en Vies des saints, composées pour l'édification des

cloîtres; beaucoup de ces légendes étaient en vers et pouvaient être chantées, comme les romans profanes qu'elles devaient remplacer dans les monastères.

Le mariage de Henri II avec Eléonore de Guienne, en donnant au monarque anglais des possessions en France, augmenta les rapports des deux pays, et contribua encore à répandre la langue française. Tel était alors le mépris où était tombé l'anglo-saxon, qu'il n'était plus parlé que par les habitants des campagnes et les dernières classes de la population des villes. Le français menaçait donc d'expulser entièrement l'anglais, mais il y eut bientôt une réaction. Le joug de fer des Normands leur avait aliéné les cœurs d'un peuple qui, jaloux de ses droits, ne pouvait voir d'un œil tranquille l'édifice politique de la féodalité élevé sur le sol anglais par l'aristocratie normande; la longue rivalité de la France et de l'Angleterre, survenant à la même époque, acheva de décider la victoire en faveur de l'idiome germain ; on ne voulut plus de la langue d'un ennemi implacable; le fond de la langue resta donc saxon, et fut seulement modifié par l'introduction d'une foule de mots étrangers. L'élévation politique du tiers-état ou de la bourgeoisie anglaise," qui avait été plus fidèle que la noblesse aux coutumes et à la langue nationale, dut beaucoup contribuer à cette révolution, que Johnson fixe à l'an 1150.

Peu à peu la langue primitive reprit sa prépondérance. Sous Edouard II on voit les ménestrels reparaître. Edouard III, tout en prenant le titre de roi de France, et en adoptant pour l'Angleterre le rouge jusqu'alors couleur nationale de la France, bannissait la langue française de ses États, et déclarait l'anglais langue légale (1361).

Malgré cet édit, il resta longtemps encore de nom breuses traces de l'idiome auquel on avait été accou tumé; les avocats surtout, dans leurs plaidoyers, furent les derniers à y renoncer, et même quelques-uns des termes employés par eux se sont perpétués jusqu'à nos jours dans la langue technique du barreau. Hygden, dans son Polychronicon, dit que ce ne fut guère qu'en 1385, la 9 année du règne de Richard II, que les enfants abandonnèrent, dans les écoles, le français pour l'anglais; John de Cornouailles, maître de grammaire, adopta le premier cette réforme, que d'autres imitèrent bientôt après.

La guerre civile entre la maison d'Yorck et de Lancastre, connue sous le nom de Guerre des Deux-Roses, fut un temps d'arrêt pour la langue; les progrès ne recommençèrent qu'avec Henri VIII, mais alors ils furenti accélérés par l'impulsion que la Réforme donna à l'es prit humain, les discussions religieuses fournirent une nouvelle vie à la littérature; et en Angleterre, comme en France et en Allemagne, le premier ouvrage régulier en prose sortit des mains d'un réformateur: la traduction de la Bible en langue vulgaire par Wickliffe (1535).

Jusqu'à cette époque, la langue n'avait pu trouver une forme savante, réglée; elle était indocile et capricieuse. L'étude de l'antiquité la dota de ces règles qui lui manquaient, et l'enrichit en même temps d'une foule d'expressions d'origine grecque et latine; l'accentuation devint plus nette et plus certaine, grâce aux efforts des poètes intéressés à fixer la langue et à la faire plier sous un joug salutaire. Le pédantisme latin fut même porté à un tel point, qu'un auteur contemporain, F. Brown, écrivait

que le latin serait bientôt nécessaire pour comprendre l'anglais. L'imitation de l'italien, à la mode sous Elisabeth, acheva de donner à la langue anglaise le vernis d'élégance et la délicatesse qui lui manquaient. C'est l'époque: de Spencer, de Shakspeare, de Waller, de Dryden, de Milton.

Avec la restauration, s'intronisa le goût français; ik acheva de pousser la langue dans la voie du purisme, et. Jonhson est si effrayé du grand nombre des em-prunts faits à la littérature d'outre-Manche qu'il s'écrie: «Que les Anglais seront un jour réduits à marmoter un dialecte français. » L'influence française est visible dans les écrits purs et châtiés de Steele, de Pope, d'Addison; mais si la langue gagne en grâce et en régularité, elle perd autant en énergie et en originalité. Les écrits des auteurs de l'époque se débarrassent des longues parenthèses et des énormes périodes des auteurs du XVII siècle; on donne plus de précision à l'expression, et la langue achève de se régulariser et de s'adoucir, grâce aux. nombreuses et savantes études de quelques grammai~ riens qui, dans leur sphère plus modeste, complètent l'œuvre commencée par les grands écrivains, parmi lesquels il faut surtout distinguer Q. Peyton, William Lemon, Samuel Johnson, Robert Lowth, Lindley Murray, J. Wal ker, Thomas Sheridan et Harris, etc.

Les dialecte écossais, dans son développement, marcha de pair avec l'anglais. Dans la patrie des bardes, la poésie devait être précoce; aussi John Barbour précéda❤~ t-il le poète anglais, Chaucer. La différence qui existait entre les deux langues fut entretenue par la longue lutte des deux peuples. Néanmoins, au x siècle, la langue

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anglaise commençait déjà à être d'un usage général en Ecosse, excepté chez les Highlanders, ou habitants des hautes terres, lorsque la réunion des deux couronnes sur la tête du fils de Marie Stuart, porta à la langue écossaise un coup mortel, dont elle ne s'est jamais relevée; elle devint un dialecte, dans lequel le poète Robert Burns a composé d'admirables chants.

Un des principaux morceaux qui nous reste de la poésie gaélique, ce sont les œuvres si contestées d'Ossian, célèbre barde écossais du e siècle; ses vers, qui se chantaient en Écosse, étaient complétement ignorés en Angleterre lorsque Macpherson les fit connaître par une traduction ou imitation en prose poétique vers 1762 (un recueil plus complet fut édité par Smith, Edimbourg, 1780). Ces morceaux sont presque tous lyriques ou épiques; l'opinion générale au sujet de ces œuvres est que Macpherson et Smith ont véritablement découvert des poésies d'Ossian, mais qu'ils les ont dénaturées en voulant leur donner une forme et un style étrangers à leur époque.

Le dialecte irlandais n'a jamais eu d'existence indépendante; les poètes et les littérateurs de l'Irlande appartiennent de droit et de fait à l'Angleterre ; et Shéridan et Thomas Moore, quoique Irlandais, ont toujours été revendiqués par l'Angleterre, comme faisant partie des plus beaux fleurons de sa couronne poétique. Les seuls ouvrages de la langue erse ou irlandais primitif, sont quelques ouvrages théologiques, dus aux anciens moines de l'Irlande, et quelques poésies recueillies et publiées par miss Brooke, Dublin, 1789.

Le génie de la langue anglaise est celui de la fusion,

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