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DE

QUELQUES VILLES ET PORTS

DE LA MER NOIRE.

Pour compléter les renseignements que le commerce pouvoit desirer sur les ports de la mer Noire, . j'ai eu recours à l'obligeance de mon collègue, M. Adrien Dupré, consul de France à Salonique. Il a bien voulu me permettre d'extraire d'un voyage inédit, plein de savantes recherches, la description de quelques villes que je n'ai pu visiter moi-même.

M. Dupré, déjà connu par un voyage en Perse, rempli de vues utiles, est fils d'un ancien consul, qui, pendant sa longue résidence à Trébizonde, a su s'y faire aimer et respecter. Il a passé quelques années près de son père, et a été à même de bien connoître les pays qu'il décrit.

Batoum.

Batoum, qui à environ deux mille habitants, parmi lesquels on compte quelques Arméniens, res

semble plus, par ses maisons éparses çà et là, à un vaste hameau qu'à une petite ville. Elle est située sur le bord de la mer, et n'a qu'une rade ouverte à l'E., au N.-E., au N., et défendue à l'O. par une langue de terre et de sable, courant au nord l'étendue à peu près d'une lieue. Cette rade est profonde, et les bâtiments y sont aussi en sûreté que dans le meilleur port. Ils peuvent lier leur câble à terre à la distance de dix toises. Aucun fort ne la défend; une seule tour, environnée d'un fossé sans canons, dont la base est en pierres et le reste construit en bois, se trouve à l'entrée du bazar. Ce dernier ne consiste qu'en une cinquantaine de mauvaises boutiques, où l'on n'aperçoit que des objets de peu de valeur. Le pays est fertile en fruits, en blé, et surtout en riz; mais le commerce de cette ville est nul; les petits navires et les bateaux qui y abordent n'apportent en général que du fer, du sel, du savon, et quelques étoffes à l'usage des habitants. Les chemins difficiles que l'on trouve dans le vallon d'Adjéré, font préférer aux négociants d'Akiska de tirer leurs marchandises des marchés d'Arzroum.

En effet, dans les cinq jours de marche que nous avons faits dans ce vallon, nous n'avons pas rencontré la plus petite caravane. J'aurai occasion de revenir dans un autre chapitre sur ce sujet, et de démontrer combien M. Peyssonnel a été induit en erreur, en indiquant au commerce la route de Batoum à Akiska,

Le commandant de Batoum relève du pacha d'Akiska. Sa maison, défendue par une tour en pierres, est située à un quart de lieue au nord de la ville, sur une hauteur; au-delà coule la rivière de Batoum, l'ancien Bathys, que l'on trouve dans le périple d'Arien.

Akiska.

La province d'Akiska, qui paroît avoir été autrefois le Haut-Khartel, faisoit partie de la Géorgie supérieure, ainsi appelée par les Arméniens à cause de sa position physique. Elle renferme vingt-quatre districts, composés de beaucoup de bourgs et de villages, et s'étend vers l'ouest, d'un côté, à peu de distance d'Arzroum, et de l'autre jusqu'à la mer Noire à l'est, vers Tiflis, jusqu'à une journée et demie de marche, à deux au midi, du côté de Kars; enfin à trois vers l'Immirette. Cette province fut souvent comprise dans celle de Daïkh, située au nord-est de la Haute-Arménie, au nord de la province d'Ararat, à l'ouest de celle de Koukarkh, à l'est du pays de Khadghdigh (le Keldir des Grecs), et de celui des Lazes, et enfin au sud de la partie de la Colchide et de l'Ibérie qui formoit le royaume de Gouriel avant sa conquête par les Russes. Après la destruction du royaume d'Arménie, le pays de Daïkh passa sous la domination des empereurs de Constantinople; mais les princes Mamigoniens qui y avoient une partie de leurs possessions héréditaires, et après

eux les Géorgiens, ne leur en laissèrent jamais la jouissance paisible (1). Ces derniers en restèrent enfin les maîtres jusqu'en 1580, époque à laquelle Menoudjeher, fils de Gazeh, qui en étoit alors souverain, vaincu par les Turcs, fut contraint de se soumettre à leur puissance; ayant embrassé l'islamisme, il prit le nom d'Atta-Bey, et fut élevé à la dignité de pacha d'Akiska.

Les Persans dans la suite s'en étant rendus maîtres, le sultan Murad IV la fit assiéger par Hassan-Pacha, qui la reprit après un siége de vingt-trois jours, et en transmit le gouvernement à ses descendants.

Le pays de Daïkh semble tirer son nom de la puissante nation nomade des Dahi, qui, dès le temps d'Alexandre, étoit répandue dans toutes les contrées au nord, à l'est de la mer Caspienne, et même dans l'intérieur de la Perse (2). Suivant Ammien Marcellin (3), elle avoit aussi des établissements sur les bords de la mer Noire et dans les environs de Trébizonde. Les Dahi paroissent répondre aux Taochi des anciens écrivains Grecs.

La ville d'Akiska, comme l'appellent les Turcs, ou d'Alkhalzikhè en Géorgien, c'est-à-dire nouvelle forteresse, est la capitale de la Géorgie turque. Elle

(1) Faust. Byzant., liv. 3, cap. 18, pag. 71.

(2) Strab., lib. 11, pages 508, 511, 515 et pass; Quint. Curt., lib. 4, cap. 12, lib. 5, cap. 3; Arrian, de exped. Alex., lib. 3, cap. 28 et 30.

(3) Lib. 22, cap. 8.

est située sur le penchant d'une colline et dans un vallon, coupé à droite par une rivière qui porte son nom, et, prenant sa source dans les montagnes d'Achik-Bach, mêle ses eaux, comme je l'ai déjà dit, au Cyrus. Sa rive droite est embellie par une infinité de jardins. On y voit encore les débris du palais d'un pacha nommé Suleyman, qui, s'étant révolté contre son souverain, s'y défendit long-temps, et enfin succomba. La ville proprement dite est entourée de fossés, et d'un double rang de murailles crénelées et flanquées de tours carrées et rondes; un fort la domine. Auprès du palais du gouverneur est une belle mosquée.

La population de cette ville peut s'élever à quarante mille âmes. Les Turcs en forment la majeure partie. Les Arméniens, les Géorgiens et les Juifs sont en petit nombre, soit dans la ville, soit dans les villages environnants. Les uns et les autres ont leurs églises et leur synagogue, leurs prêtres et leurs rabbins. On compte à Akiska cinq cents familles catholiques, et autant d'éparses dans les villages d'Yolita, de Zghrati, de Valeh, d'Aral, d'Udeh, d'Abastaman, d'Ardahan, Veli, Ardanudgi, Bara, Artvin, Chertoïs, Akhor-Kelek et Chisabavra. Les catholiques ont à Akiska deux eglises desservies par six prêtres, qui officient en langue arménienne. L'un d'eux se fait distinguer par la barbe la plus belle et la plus longue que j'aie vue de ma vie. Il est obligé de la rouler, pour empêcher qu'elle ne traîne à terre. Les Turcs, outrés

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